Mes grands yeux de poupée
pleurent encore
« La pédophilie au féminin existe. Je l’ai rencontrée. Elle me définit en profondeur. Ceci est un roman érotique.
Moralistes et petits esprits s’abstenir. J’ai vécu les années déterminantes de ma vie de petite fille comme victime de
la pédophilie d’une femme. Il n’y eut là rien de brutal, rien de grossier, rien de cuisant. La douceur de cette inoubliable
expérience se compare au velouté d’une drogue dure. Se droguer est une aventure infiniment suave, dans l’immédiateté
du moment. C’est seulement à terme qu’on se rend compte qu’on est en train de se détruire. De la même façon que
je suis une toxicomane potentielle, je suis, en tant qu’adulte, une pédophile potentielle. Mon armature morale m’empêchera de
céder parce qu’avec les drogues on ne détruit jamais que soi, tandis qu’avec la pédophilie, c’est une autre vie
qu’on balafre pour toujours. Je ne le ferai jamais. Mais c’est là un effort permanent dont je revendique le mérite. »
Si vous voulez humer les effluves du banquet qui nourrit en permanence les pédophiles non violent(e)s et entendre l’insidieuse musique du
joueur de flûte du Hamelin secret de l’amour, ouvrez ce délétère recueil de souvenirs. Tout y est avoué, sous le
masque, certes, mais sans fard.
Première diffusion le 22 mai 2016
4,99 € - 6,49 $ca sur 7switch | Poids lourd | Romans
ISBN : 978-2-924550-19-9
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Un échantillon de l’enfance
Je me tiens nue devant mon miroir. Je suis finalement enfin revenue de cet horrible et douloureux séjour insulaire. Me revoici chez moi,
dans ma chambre, libre, tranquille, porte close, verrouillée. Je suis mal, j’ai mal, je suis blessée. Je ne le comprends pas
encore pleinement mais je viens de tout doucement commencer à m’autodétruire. J’aurais tellement dû me méfier.
Mais Mariette ne m’a pas appris à me méfier.
Mariette ne revient que demain. De toute façon mes mains, mes genoux, et surtout, mon con, mes lèvres de con, mes tréfonds
de con sont cruellement égratignés. Or quand je souffre, quand je suis malade, malingre, écorchée, esquintée,
estourbie, Mariette ne m’approche jamais. Quand ma santé vacille, elle entre en mode nanny strict. Ce n’est pas de la
douceur ou de l’abnégation de sa part. C’est de la méthodologie pédophile. Je le sais, maintenant que je suis une
femme, que je suis devenue le dindon foutu de Lewis Carroll qui écrit ces lignes sur l’enfance avec la plume trempée dans le sang
souillé et les larmes acides de l’adulte. Mariette veut faire jouir l’enfant parfaite, la petite poupée huileuse et sans
aspérité. Elle n’est pas ici pour me consoler ou m’éduquer. Elle est ici pour me boire, me dévorer, me sucer
comme un os de volaille avant que la viande de gibier que je lui suis ne refroidisse et que la sauce vive ne se fige.
Je suis donc seule, devant mon miroir. Et mes écorchures me sont un problème. L’idée de les dissimuler ne me vient
même pas. Je sais qu’en condition ordinaire, il suffit d’attendre le soulagement naturel et Mariette revient, lascive, se poser sur
la fleur de mon innocence après l’averse. Non le problème, là, c’est mon con. Il fait moins mal que mes mains, mes
genoux et mes avant-jambes qui, eux sont couverts de croûtes et m’élancent passablement. Mais ces blessures sont diurnes et solaires.
Elles me cuisent certes mais c’est simplement parce qu’elles se dissolvent déjà sous la lumière. La douleur de mon con,
elle, est nocturne, caverneuse, obscure. Le con me fait mal de façon insidieuse. Il est gêné, irrité comme un cul qu’on
aurait mal torché. Je le sens sale, encombré, enchifrené. Je ne le comprends encore que confusément mais, pour la première
fois de ma vie, j’ai été violentée. J’ai l’impression que mon con est surchargé de la merdasse épaisse
et noire qui engendra une hydre, dans mon cauchemar de l’autre nuit.
Momo, ce fut un viol. Mariette, c’est un abus. La distinction est capitale. J’y tiens autant qu’à ma vie. Il n’y a que Mimi
qui, dans tous les sens du terme, ne m’a rien fait. Sauf si elle m’a trahie et livrée comme une proie à son horrible jumeau, naturellement.
Mais, ça, il faudra y revenir plus tard. Mariette est douce, bonne mais veule et principiellement malhonnête. Momo était peut-être
impulsivement sincère dans son désir mais gauche et brutal. Il s’est irrémédiablement discrédité. Et ceux
de son sexe myope et sot avec lui. Momo m’a dégoûtée du viol alors que Mariette m’a superbement vendu l’abus. Je
le sais maintenant. Mais ce jour-là, je ne vois pas ça. Je ne vois que moi.
Je m’aime nue. J’aime mon corps. Surtout mes cuisses, le dos de mes mains, mes lèvres et mes yeux. C’est vrai que j’ai des
yeux de poupée ou de manga. Quand je reste immobile suffisamment longtemps devant le miroir, ça en devient presque ridicule. On pourrait presque
me photographier, convertir la photo en cyber-croquis et patatras : un manga. Quand mon visage redevient mobile cette impression disparaît quelque peu.
Je me rapproche très près du miroir et je fais des faces. J’approche mes lèvres du reflet de mes lèvres. J’aurais bien
aimé rencontrer une petite fille de mon âge, cet été. J’ai eu si mal quand les lèvres de Mimi se sont reculées
devant les miennes, que sa main s’est posée sur mon thorax palpitant, comme pour freiner ou repousser. Je voudrais aimer. Aimer quelqu’un comme
moi, une égale, une humeur, un frémissement comme moi. Ne pas être automatiquement acceptée de Mimi me fut difficile, le premier effet
en retour pervers de l’amoralité pédophile. Douleur cuisante. La douleur des paumes et des genoux est irritante. Celle du con souillé
et violenté par le sosie gauche et grossier de mon petit amour des rochers est cuisante. On dirait que ce trou que j’ai entre les jambes attire les
mouches, les scolopendres, toute la vermine de la terre. Elle y grouille, cette vermine. Elle m’y hante. Il est déjà bien loin le doux temps
où Mariette me doigtait avec une douceur infinie dans le bain. Elle ne me violentait pas. Jamais. C’est qu’elle laissait cette tâche
implacable aux autres. À ceux qui allaient venir. À ceux qui sont venus. Je suis salie, je suis souillée. J’ai mal. Seule la psyché
et la mémoire méthodique et noueuse de Mariette emprisonne, en elle, les moments disparus de ma sexualité vive, primale et joyeuse. Cette image
dans le miroir ne me rejoindra jamais. Ce qu’elle est n’est pas de chair. Le vent de la mer dans des cheveux roux. Des taches de rousseur sur une peau
satinée, des lèvres pulpeuses et rieuses. J’ai raté une rencontre. J’ai trébuché dans un passage et je me suis rétamée.
Je crois que Mimi, j’aurais pu l’aimer. Avec Mariette, ce n’est pas aimer, c’est subir. Elle se cache trop. C’est pas net. Mimi se cachait aussi
mais c’était différent, plus frais, plus intime, plus juste. Mimi me rencontrait. Mariette me possède. Et surtout devant Mariette je ne suis pas
devant un miroir, plutôt devant un gouffre sans fond.
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Bon à savoir
Corinne LeVayer refuse toute mention de son identité réelle, dans le but explicite de protéger les identités, notamment celle de ses parents
ainsi que de la criminelle sur laquelle est basée Mariette. Tout a été bouleversé, les lieux les temps, les situations, même les genres
musicaux. Ne reste que l’émotion fondamentale. L'extase de la complice de pédophilie (LeVayer refuse le statut de victime) et la destruction de la
communication adulte que cela entraîne. La cocaïne a un statut métaphorique de l'abus par un adulte. Cette drogue vous exalte sur le coup, dans l'innocence
de la jouissance naïve. C'est à terme qu'elle vous détruit. Aussi, sevrée, on peut toujours y retomber…
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Un échantillon de l’âge adulte
Juillet 2016. J’ai aujourd’hui trente-neuf ans et mon adulescence est bel et bien terminée. J’ai plus vraiment le cœur ou la tête à
jeunesser. La drogue, la prostitution, les Jane, les John, la merde, j’ai fini par m’en sortir, peu vous importe comment. On en reparlera peut-être une
autre fois. On s’en sort toujours un peu, par un bout ou par un autre, de toute façon. Je suis revenue au Canada. J’habite maintenant la Nouvelle-Écosse, pas trop
loin de chez mes parents, aujourd’hui retraités. Je me suis même mariée avec Aude, une femme merveilleuse qui m’a beaucoup aidée à remonter la
pente du love for sale et de la poudre interdite. Je n’ai plus de contrebasse. Je n’en ai pas vraiment rejoué. Je touche le piano (Monsieur Clinkscales n’est
plus mais il vit toujours en moi). J’écris. Je compose des mélodies et des arrangements pour des orchestres locaux. La scène jazzique est toujours très active
dans les Provinces Maritimes. Je n’ai plus vraiment repensé ouvertement à ma nanny Mariette. Sauf une fois, une fois terrible. Une épouvante.
C’était il y a quelques semaines et c’est ce qui m’a décidée à mettre par écrit le présent recueil de souvenirs intimes qui est
aussi une manière de cri d’alarme. Ce matin-là, Aude et moi on se rend chez Kiruna, un grand magasin de meubles démontés, célèbre dans
le monde entier pour ses salles d’exposition mirifiques admirées de toutes les femmes de la terre. Aude et moi envisageons de rénover notre cuisine et nous sommes ici,
insouciantes et joyeuses, pour faire le plein d’idées. Je ne pense à rien d’autre qu’à m’amuser à composer des intérieurs de cuisines
en kit, originaux et contrastés.
Évidemment, le marchandisage visuel chez Kiruna étant ce qu’il est, nous devons transiter par l’intégralité des décors d’intérieurs
avant de trouver ce que nous cherchons. C’est en traversant les compositions de chambres à coucher que la foudre m’a frappée. Une magnifique petite fille de dix ans est
assise nonchalamment au bout d’un des grands lits. Elle porte une petite jupe courte et froufroutante couleur kilt et ses petites cuisses sont nues et merveilleusement dessinées.
Je gagerais tout ce que j’ai de plus précieux qu’elle n’a pas de petite culotte sous la jupette-kilt. Son regard croise le mien et elle me sourit poliment, en toute
innocence, de ses petites lèvres satinées magnifiquement dessinées. Ses cheveux châtains sont incroyablement soyeux et ils ressemblent à une superbe crinière
de grand fauve. Je la reconnais tout de suite sans l’ombre d’un doute, cette enfant sublime. C’est Léa, la jeune mannequin involontairement salace de ce fameux catalogue
de pré-saison automnale 1989-1990 du détaillant de godasses Goldenrod. Le fait empirique et factuel que cette mannequin serait mon aînée d’au moins cinq ou six
ans aujourd’hui (et aurait donc en fait environ quarante-cinq ans) ne me vient même pas à l’esprit. Léa, la Léa de tous mes rêves les plus fous, est là,
sur ce grand lit Kiruna. Elle est esseulée et libre. Elle est à prendre. Ma gorge se noue. Mon cœur se serre. Le souffle me manque. Mes grands yeux de poupée se givrent
de nouveau de larmes. Je dois cesser de marcher une seconde, sonnée, foudroyée. Aude, qui me tient par le bras, s’arrête aussi, distraitement, contemplant et commentant les
luminaires qui sont du côté opposé de la petite merveille impudente de petite fille sur son grand lit, qui me sourit toujours. Je me couvre les yeux d’une main et les serre
très fort, comme pour en expurger mes larmes.
Quand je rouvre les yeux, Aude et tous les autres chalands ont disparu. L’immense conglomérat de salles Kiruna est intégralement vide de toute vie humaine… sauf
pour deux personnes : Léa et moi. Enfantine et garce en même temps, Léa me sourit toujours. Voici qu’elle se pose sur le lit à quatre pattes et adopte langoureusement
la position que Mariette et moi appelions autrefois le piano. Ses jambes sont entrouvertes et ses petits bas blancs, ses petits souliers noirs brillants, sa jupette-kilt ébouriffée
dans les teintes de rouge et de noir, maintenant toute retroussée en croupe me confirment mon impression initiale. La petite aguicheuse ne porte pas de petite culotte. J’entrevois maintenant,
entre les replis de la jupette-kilt, sa mignonne fente de con, luisante, nue et lisse. Je jette mon sac à main par terre et, dans un râle larmoyant, je me pose à genoux au bout du grand
lit. Je saisis les cuisses de Léa à pleines paluches et enfonce une langue goulue et lourde dans son petit con entrouvert. Léa couine comme un petit chat, fouette le ciel de sa soyeuse
chevelure, se tortille ardemment, pousse brutalement son con dans ma bouche et se met à appeler mon nom : Corinne, Corinne, Oh Corinne…
Corinne ? Corinne ? Aude me secoue par le bras dans le magasin Kiruna de nouveau bourdonnant de chalands. Je pousse un soupir étranglé et me tourne vivement
en direction de mon épouse, ses yeux dans les miens. Je ne veux plus voir Léa. Je ne veux pas de cette vérité-là. Je ne veux pas de cet insidieux sort-là. Aude
a-t-elle remarqué mon moment d’affriolement coupable envers la petite inconnue ? Je ne sais. Je regarde maintenant droit devant moi et tire Aude hors de l’espace des chambres
à coucher. Pas d’explication, pas de commentaire. Je n’ai jamais revu Léa (avec laquelle, inutile de dire qu’il ne s’est absolument rien passé,
matériellement parlant). Mais désormais, chaque fois qu’on va au Kiruna, j’y pense. Je veux Léa plus que tout. Je veux la prendre. Je veux la posséder.
Je veux la violer aussi brutalement qu’on me viola. Je veux la détruire pour qu’elle ne soit jamais qu’à moi, moi, moi.
Seule, ce soir, devant mon écritoire, la plume crissant sur le beau papier non-virtuel, l’aveu doit maintenant tomber, nouveau, douloureux, surprenant, cuisant, répugnant mais
grandiose. Je suis attirée par les petites filles. Je ne le savais pas avant, au cours de mon interminable adulescence musicale, toxico et folle, car j’en étais une
moi-même, de petite fille. Maintenant c’est dit : je suis adulte et je suis pédophile. Je suis pédophile, comme certains abstinents durs sont alcooliques ou toxicomanes,
sans jamais toucher aux substances en cause. Pédophile Anonyme ! Mariette m’a finalement transmis cette saloperie impalpable qui désormais me guettera toujours, comme
une bête dans une fosse. Tant que les versions cristallines et enfantines des Léa, des Jessica, des Doudou, des Élouade, des Shannon, des Inferno, des Aude, des Corinne existeront,
le danger sera là, entier, virulent, implacable. Mais, je le jure en levant bien droit la main de justice de tous mes cauchemars d’autrefois : plutôt crever que de me mettre
à souiller ainsi des vies pour ma jouissance égoïste. Jamais je ne passerai à l’acte. Jamais.
Jamais, jamais, jamais, jamais, jamais…
[Retour…]