S.I. : un roman de Guilhem


Dans le vaste dispositif interplanétaire évoqué ici, très slow-motion d’allure, très solitaire aussi, tout bouge de façon ultra-rapide, mais en se transposant dans l'immense lenteur de l'espace. On découvre graduellement, en ce monde muet, un ensemble de conflits et de tensions entre un oligarque et une structure décisionnelle totalitaire mi-ratiocinante, mi-cléricale, qui porte le nom assez inquiétant de Silence Immobile (S.I.). Une jeune commandante de vaisseau va, bien involontairement, nous colporter, entre autres, à travers les aléas de sa vie émotionnelle et amoureuse. Son univers personnel sera largement occulte parce que tout ce qui est idylle semble être strictement géré, sinon prohibé, dans cet univers cosmique très partoculier. En plus, de fil en aiguille, cette captivante personne, décalée et réservée, va devenir, totalement malgré elle, une figure politique majeure. À ce titre, elle sera confrontée à des enjeux terribles impliquant des femmes et des hommes, jeunes et vieux. Arrivera-t-elle à faire face de façon adéquate à cette vastité abstraite des espaces, des passions et des pouvoirs? La conclusion à laquelle on arrivera est que, dans l'espace, en ce vide cosmique intégral, même quand tout a été préalablement soigneusement calculé, on n’est jamais à l'abri du petit météore aléatoire, parfaitement inattendu, qui vous glisse entre les doigts, si vite et si lentement, à la périphérie du système fatal de toutes nos attentes…


Poids : lourd | Prix sur 7switch : 4,99 € - 6,49 $ca | Collection : Romans
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Premier extrait

— Ce n’est pas moi et ça ne peut plus être la comète S.I. C’est donc Contrôle qui vient d’émettre ce blackout. Ça signifie que l’Ennemi a été repéré dans le Système solaire par une comète-vigie…

Antéa continua de scruter l’Amas du regard. Quelques petits flashs sporadiques étaient encore visibles çà et là.

Antéa n’eut même pas le temps de se mentir. Autrefois, elle se serait dit que l’Ennemi était probablement apparu à une de ses deux positions habituelles, qu’il n’y avait rien à craindre, ou qu’il n’existait peut-être même pas si ce n’était dans la folie sécuritaire de Silence Immobile…

D’un seul coup, une sphère multicolore apparut, là où se trouvait la comète S.I. avant sa fragmentation.

L’Ennemi était au beau milieu de l’Amas. En cet instant, tous ceux qui ne croyaient pas en lui eurent confirmation qu’il existait bel et bien.

Une terreur ancestrale naquit en Antéa.

Elle cessa de respirer.



Deuxième extrait

Le vaisseau-comète se faufilait à travers les gros débris qui auraient pu constituer un danger. Il continuait à accélérer.

Antéa était concentrée sur sa conduite. Ses yeux papillonnaient en tous sens. Elle souriait.

Devant elle, ses doigts dansaient comme ceux d’une pianiste virtuose dont la musique s’exprimait en mouvements silencieux à travers le vide spatial.

— Tu prends des risques inutiles.

— Si peu.

— Veux-tu connaitre la quantité de fois où nous avons failli mourir depuis ton départ ? J’ai un décompte exact à te soumettre. C’est un nombre à deux chiffres…

— Tu as peur ?

— Non. Même si j’en suis capable bien entendu, depuis que tes modifications m’ont rendu sensible. Tu oublies juste que je suis une intelligence partielle. Mes habiletés de calcul et de perception sont plus affutées que les tiennes. Ça m’autorise à modérer mes émotions, à garder sur elle toute l’emprise nécessaire et à conserver ma rationalité en toutes circonstances. Je sais parfaitement quand il y a un… DANGER !

Antéa braqua ses deux mains, provoquant deux puissants dégazages simultanés qui permirent au vaisseau-comète d’éviter de percuter de plein fouet un autre vaisseau dont la trajectoire était rectilignement dénuée de fantaisie.

Antéa avait un sourire sadique sur le visage.

Les lueurs de stase d’Amitié virèrent au bleu pâle.

— Oups, dit-elle.

— Tu viens de recevoir une capsule d’insultes. Veux-tu savoir de quoi t’a traitée le pilote ?

— Mmm… « Morue » ?

— Non.

— « Connasse » peut-être ?

— Non plus ! Dernière chance.

— « Salope » alors.

— Encore perdu ! C’était « Grosse tarée ».

— Quoi ? C’est tout ?

Elle semblait sincèrement déçue.

— Nouveau paquet ciblé. C’est Contrôle. Ton superviseur t’adresse un blâme.

— Pff… Pendant que je m’arrime, conteste-le pour moi. Il n’y a pas eu choc ni déplacement logique. Je conduis comme une comète imprévisible ; le protocole est donc respecté. Ce blâme sautera.

— Tu vas encore te faire un ami chez Contrôle. Enfin… Comme tu veux, Antéa.

Elle fit décélérer le vaisseau-comète à l’aide de puissants dégazages à l’approche d’un autre astéroïde aménagé, beaucoup plus gros que le sien.

— On y est.

Maintenant, commençait la manœuvre la plus périlleuse. Antéa coupa la musique.